dimanche 29 décembre 2013

Au musée de l'Orangerie à Paris, les cheveux de Frida Kahlo s'exposent jusqu'au 13 Janvier


Frida adolescente, la houle de ses cheveux

Auto-portrait à la robe de velours, 1926, Coyoacan, Mexico


Frida a dix neuf ans. Sa crinière se confond avec l'onde et évoque les boucles des Vénus de Boticelli. Elle peint ce premier tableau pour son fiancé Alejandro Gomez Arias qui l'a quittée et exprime la tourmente de son coeur par la tempête de ses cheveux.

vendredi 27 décembre 2013

Frida coupée en deux,transfigurée par l'art

Auto-portrait, colonne brisée, 1944

Cheveux libres comme son pinceau trempé dans l'épreuve, l'artiste se représente coupée en deux pour mieux se recréer. Pour Frida,  peindre, c'est sublimer l'intensité de la douleur physique et morale liée à l'accident qui a brisé sa vie à 19 ans.

Frida trahie, cheveux tranchés

Auto-portrait aux cheveux coupés, 1940

Frida sacrifie sa féminité, se défigure en massacrant sa chevelure pour exprimer la violence de la rupture avec Diego de Rivera. Détachées d'elle, ses longues mèches sombres rampent comme des serpents menaçants à ses pieds. 

Frida la mexicaine, coiffée de son pays

Auto-portrait dédié au docteur Eloesser, 1940

Frida affirme sa nationalité mexicaine dans les coiffes qu'elle arbore. Son lourd chignon tressé et fleuri exprime son appartenance à une terre dont elle revendique les traditions. 

Frida, souvent écorchée, jamais détruite

Autoportrait au collier d'épines, 1940

Couronne d'épines autour du cou, s'inspirant du martyre du Christ, Frida vit un véritable chemin de croix. Mais les papillons blancs et aériens posés sur la masse sombre de ses cheveux expriment sa foi en la vie et son espérance de la résurrection.

Frida défaite comme ses cheveux

Frida aux cheveux défaits, 1947

Cheveux dénoués et regard perdu, Frida se représente devant une paroi minérale et trouée. Seule trace de vie dans cet auto-portrait de la désillusion, la plante grasse dont les tresses lumineuses semblent jaillir du néant.

En boucle avec Cologne

Vu dans le métro à la station Michel-Ange Molitor, une affiche intrigante où la chevelure invite au départ. Les mèches en cascades forment l'écrin naturel des vieilles cités d'Europe. Entremêlée aux boucles soyeuses, la ville devient un élément organique et onirique. Une vision sensuelle et féminine du voyage.

mardi 14 mai 2013

Cheveux rebelles en Colombie, le 12 Mai, à Cali


Le neuvième concours Afro des coiffeurs s'est tenu  dimanche 12 Mai à Cali. Libres et inventives, ces coiffures ornées de tissus bariolés, de perles et de fruits témoignent du temps de l’esclavage. Après des journées de travail éreintantes dans les plantations de canne à sucre, les femmes afro-colombiennes inventaient ces coiffures extravagantes, pour échapper à leur condition d'esclave. 
On n'emprisonne pas les cheveux !







samedi 27 avril 2013

Georges Rodenbach, romancier symboliste


Bruges-la-Morte (roman,1892)
Hugues est veuf et ne supporte pas la mort de son épouse. Son amour pour elle était si fort qu’il a conservé la chevelure de la disparue et lui voue un culte mystique. Quand une autre femme commet le sacrilège de toucher à cette relique, la tresse de la défunte se mue en instrument de mort. 


Puis, la jeune femme était morte, au seuil de la trentaine, seulement alitée quelques semaines, vite étendue sur ce lit du dernier jour, où il la revoyait à jamais: fanée et blanche comme la cire l'éclairant, celle qu'il avait adorée si belle avec son teint de fleur, ses yeux de prunelle dilatée et noire dans de la nacre, dont l'obscurité contrastait avec ses cheveux, d'un jaune d'ambre, des cheveux qui, déployés, lui couvraient tout le dos, longs et ondulés. Les Vierges des Primitifs ont des toisons pareilles, qui descendent en frissons calmes.
Sur le cadavre gisant, Hugues avait coupé cette gerbe, tressée en longue natte dans les derniers jours de la maladie. N'est-ce pas comme une pitié de la mort? Elle ruine tout, mais laisse intactes les chevelures. Les yeux, les lèvres, tout se brouille et s'effondre. Les cheveux ne se décolorent même pas. en eux seuls qu'on se survit! Et maintenant, depuis les cinq années déjà, la tresse conservée de la morte n'avait guère pâli, malgré le sel de tant de larmes.

Pour la voir sans cesse, dans le grand salon toujours le même, cette chevelure qui était encore Elle, il l'avait posée là sur le piano désormais muet, simplement gisante - tresse interrompue, chaîne brisée, câble sauvé du naufrage! Et, pour l'abriter des contaminations, de l'air humide qui l'aurait pu déteindre ou en oxyder le métal, il avait eu cette idée, naïve si elle n'eût pas été attendrissante, de la mettre sous verre, écrin transparent, boîte de cristal où reposait la tresse nue qu'il allait chaque jour honorer.
Pour lui, comme pour les choses silencieuses qui vivaient autour, il apparaissait que cette chevelure était liée à leur existence et qu'elle était l'âme de la maison....”


Au terme d'une promenade dans Bruges, Hugues croise une femme qui  ressemble à la morte. Cette  apparition le fait chavirer.

“Eh bien! oui! cette fois, il l'avait bien reconnue, et à toute évidence. Ce teint de pastel, ces yeux de prunelle dilatée et sombre dans la nacre, c'étaient les mêmes. Et tandis qu'il marchait derrière elle, ces cheveux qui apparaissaient dans la nuque, sous la capote noire et la voilette, étaient bien d'un or semblable, couleur d'ambre et de cocon, d'un jaune fluide et textuel. Le même désaccord entre les yeux nocturnes et le midi flamblant de la chevelure...."

Hugues va vivre une brève idylle avec cette autre femme jusqu’au jour où Jane se rend chez lui et touche à la chevelure de la Morte.

“Jane, ironique, s'égayant avec perversité de l'irritation de Hugues, et la secrète envie de le narguer davantage, avait passè dans l'autre pièce, touchant à tout, bouleversant les bibelots, chiffonnant les étoffes. Tout à coup elle s'arrêta avec un rire sonore.
Elle avait aperçu sur le piano le précieux coffret de verre et, pour continuer la bravade, soulevant le couvercle, en retira, toute stupéfaite et amusée, la longue chevelure, la déroula, la secoua dans l'air.
Hugues était devenu livide. C'était la profanation. Il eut l'impression d'un sacrilège...
Depuis des années, il n'osait toucher à cette chose qui était morte, puisqu'elle était d'un mort. Et tout ce culte à la relique, avec tant de larmes granulant le cristal chaque jour, pour qu'elle servît enfin de jouet à une femme qui le bafoue...
Il allait la chasser! Mais Jane, tandis qu'il s'élançait, se retrancha derrière la table, comme par jeu, le défiant, de loin suspendant la tresse, l'amenant vers son visage et sa bouche comme un serpent charmé, l'enroulant à son cou, boa d'un oiseau d'or...


Hugues criait: ‘Rends-moi! rends-moi!...’
Jane courait, à droite, à gauche, tourbillonnant autour de la table.
Hugues, dans le vent de cette course, sous ces rires, ces sarcasmes, perdit la tête. Il l'atteignit. Elle avait encore la chevelure autour du cou, se débattant,
Georges ne voulant pas la rendre, fâchée et l'injuriant maintenant parce que ses doigts crispés lui faisaient mal.
- Veux-tu ?
- Non! dit-elle, riant toujours d'un rire nerveux sous son étreinte.
Alors Hugues s'affola; une flamme lui chanta aux oreilles; du sang brûla ses yeux; un vertige lui courut dans la tête, une soudaine frénésie, une crispation du bout des doigts, une envie de saisir, d'étreindre quelque chose, de casser des fleurs, une sensation et une force d'étau aux mains - il avait saisi la chevelure que Jane tenait toujours enroulée à son cou, il voulut la reprendre! Et farouche, hagard, il tira, serra autour du cou la tresse qui, tendue, était roide comme un câble. Jane ne riait plus; elle avait poussé un petit cri, un soupir, comme le souffle d'une bulle expirée à fleur d'eau. Étranglée, elle tomba.  Elle était morte - pour n'avoir pas deviné le Mystère et qu'il y eût une chose là à laquelle il ne fallait point toucher sous peine de sacrilège. Elle avait porté la main, elle, sur la chevelure vindicative, cette chevelure qui, d'emblée - pour ceux dont l'âme est pure et communie avec le Mystère - laissait entendre que, à la minute où elle serait profanée, elle-même deviendrait l'instrument de mort..."




Vu au musée archéologique d’Agrigente


Tête en terre cuite 5ème siècle avant J-C

Posée sur un cou fin, cette tête de Coré ou Perséphone est d’une grande féminité. Les yeux aux lourdes paupières, le nez noble, la courbure des lèvres, la fossette gracieuse du menton, tout est charnel dans le visage de la fille de Déméter. Mais c’est surtout la chevelure qui exprime la sensualité :  naissant en douces vagues sur le front, elle se déploie en lourdes boucles voluptueuses de chaque côté du cou et sur les épaules. Inspiré par l’art ionique oriental, ce travail est attribué à un grand artiste d’Agrigente, sans doute celui qui a modelé la tête casquée d’Athéna.




Sakkos en or 3ème siècle avant J-C

Ce délicat petit filet est conçu pour envelopper les cheveux réunis en chignon. De la dentelle d’or déployée autour d’un médaillon central orné d’ une tête de méduse finement martelée. Un précieux bijou pour orner la nuque d’une élégante.

Bed and breakfast échevelé



A deux pas de la cathédrale de Catane, Anna Faro et Antonio Recca tiennent une pension baroque et colorée à leur image. Lui peint les entrailles de l’Etna dans son atelier situé sous le logis. Elle, modèle quelques rues plus loin des figurines de papier recyclé à la chevelure dansante et au pied léger : un hymne à la féminité et à Sainte Agathe, protectrice vénérée de la ville.


B and B Faro,Via San Michele 26, Catane, Sicile


Charles Baudelaire, voyageur amoureux


Pour le poète, la chevelure, première parure de la femme aimée, invite aux langoureux voyages. En plongeant avec délice dans les tresses dénouées de son amante - Jeanne Duval, dite la Vénus noire - l’auteur lève l’ancre, associant les ondulations de ses boucles d’ébène à l’univers liquide, les parfums de sa sombre crinière à un ailleurs paradisiaque. Rêves et souvenirs lointains s’entremêlent dans une succession de tableaux voluptueux. Quand la chevelure devient navire, roulis, mousson, rivage exotique, luxuriant oasis...

D'après la Danaïde d'Auguste Rodin 1885


La Chevelure ( Les Fleurs du mal, 1861)

Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure!
Ô boucles! Ô parfum chargé de nonchaloir!
Extase! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure
Des souvenirs dormant dans cette chevelure,
Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir!
La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,
Tout un monde lointain, absent, presque défunt,
Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique!
Comme d'autres esprits voguent sur la musique,
Le mien, ô mon amour! nage sur ton parfum.
J'irai là-bas où l'arbre et l'homme, pleins de sève,
Se pâment longuement sous l'ardeur des climats;
Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève!
Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve
De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts:
Un port retentissant où mon âme peut boire
À grands flots le parfum, le son et la couleur
Où les vaisseaux, glissant dans l'or et dans la moire
Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire
D'un ciel pur où frémit l'éternelle chaleur.
Je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse
Dans ce noir océan où l'autre est enfermé;
Et mon esprit subtil que le roulis caresse
Saura vous retrouver, ô féconde paresse,
Infinis bercements du loisir embaumé!
Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues
Vous me rendez l'azur du ciel immense et rond;
Sur les bords duvetés de vos mèches tordues
Je m'enivre ardemment des senteurs confondues
De l'huile de coco, du musc et du goudron.
Longtemps! toujours! ma main dans ta crinière lourde
Sèmera le rubis, la perle et le saphir,
Afin qu'à mon désir tu ne sois jamais sourde!
N'es-tu pas l'oasis où je rêve, et la gourde
Où je hume à longs traits le vin du souvenir?


Un hémisphère dans une Chevelure
( Le Spleen de Paris, 1862 )


« Laisse-moi respirer longtemps, longtemps, l’odeur de tes cheveux, y plonger tout mon visage, comme un homme altéré dans l’eau d’une source, et les agiter avec ma main comme un mouchoir odorant, pour secouer des souvenirs dans l’air.
Si tu pouvais savoir tout ce que je vois ! tout ce que je sens ! tout ce que j’entends dans tes
cheveux ! Mon âme voyage sur le parfum comme l’âme des autres hommes sur la musique.
Tes cheveux contiennent tout un rêve, plein de voilures et de mâtures ; ils contiennent de grandes mers dont les moussons me portent vers de charmants climats, où l’espace est plus bleu et plus profond, où l’atmosphère est parfumée par les fruits, par les feuilles et par la peau humaine.
Dans l’océan de ta chevelure, j’entrevois un port fourmillant de chants mélancoliques, d’hommes vigoureux de toutes nations et de navires de toutes formes découpant leurs architectures fines et compliquées sur un ciel immense où se prélasse l’éternelle chaleur.
Dans les caresses de ta chevelure, je retrouve les langueurs des longues heures passées sur un divan, dans la chambre d’un beau navire, bercées par le roulis imperceptible du port, entre les pots de fleurs et les gargoulettes rafraîchissantes.
Dans l’ardent foyer de ta chevelure, je respire l’odeur du tabac mêlé à l’opium et au sucre ; dans la nuit de ta chevelure, je vois resplendir l’infini de l’azur tropical ; sur les rivages duvetés de ta chevelure je m’enivre des odeurs combinées du goudron, du musc et de l’huile de coco.
Laisse-moi mordre longtemps tes tresses lourdes et noires. Quand je mordille tes cheveux élastiques et rebelles, il me semble que je mange des souvenirs. »

mardi 2 avril 2013

Le premier vêtement d'une femme c'est sa coiffure


Chez Saint Algue, les coiffeurs-visagistes sont à l’écoute des clientes. Emma et Cathy s’adaptent à la personnalité de chacune .
 Emma Guérri visagiste et formatrice
et Cathy Monnier directrice artistique Saint Algue.

« Avant la crise, les clientes passaient au salon pour un coup de peigne et un brushing une fois par semaine.  Les coiffures étaient plus élaborées et nécessitaient l’intervention du coiffeur.  Depuis les années 90, les coupes naturelles, les cheveux effilés qui se placent tous seuls et  les budgets resserrés ont diminué la fréquentation des salons. 
Dans un monde de stress, les clientes viennent moins souvent mais pour un vrai moment de détente  et de soins » explique Cathy Monier directrice artistique de la marque Saint Algue. « Tout doit répondre à leurs attentes renchérit Emma, formatrice visagiste des coiffeurs de l’enseigne : l’environnement accueillant du salon, l’écoute attentive et le décodage de la demande, le choix de produits respectueux du cuir chevelu, le conseil en soins capillaires…nous chouchoutons nos clientes et créons une vraie relation de confiance ».

Chez Saint Algue, les coiffeurs savent que le premier vêtement d’une femme c’est sa coiffure, que ses cheveux parlent d’elle autant que la couleur de ses vêtements, l’or ou l’argent de ses bijoux. «  Ici le coiffeur n’impose pas sa coupe à la cliente et dialogue longtemps avant de prendre les ciseaux poursuit Emma. Dans le miroir, nous montrons avant de faire.  Après une grossesse, un divorce, un licenciement, la cliente veut souvent tourner la page et couper avec le passé. Mais parfois elle est hésitante. «  Jusqu’ où êtes vous prête à couper aujourd’hui ?» est la formule rituelle ». 

La forme du visage ovale, rond, carré, rectangulaire, losange, triangulaire, détermine le choix de la coupe. Et dans chaque visage, il faudra tenons compte des assymétries, du profil doux et du profil dur..« Nous avons une règle d’or conclut Cathy : le volume doit suivre la forme du visage et accompagner ses reliefs ». « Un visage en losange avec des pommettes saillantes appelle une coupe avec du volume au niveau des joues, un visage rectangulaire de la masse au niveau des angles du front et du maxillaire » traduit Emma. 
A cela s’ajoute la personnalité de la cliente : introvertie, elle portera bien une frange protectrice, extravertie, elle aimera les coupes qui dégagent le visage et le mettent en lumière. « Il y a une coupe pour chacune et c’est au visagiste de participer à sa création. » conclut Cathy

Catherine Lalanne

Cheveux chéris au musée du quai Branly

Le musée du quai Branly mêle chevelure et culture.
Hélène Fulgence, directrice des expositions,
passe les cheveux au peigne fin.
Hélène Fulgence par Elsie

La chevelure est-elle l’objet de soins dans toutes les civilisations ?

Tous les hommes ont des cheveux sur le crâne. Cette matière lisse, bouclée ou crépue qui couronne notre visage est un sujet universel qui traverse toutes les cultures.

Nos cheveux expriment d'abord notre désir de beauté ?

Ils sont un élément de parure ou de séduction mais participent aussi à la fabrication de la personne humaine. Ils sont au croisement de l’intime et du social, témoignent de la dignité de chacun et des valeurs d’une société.

Notre façon de les coiffer est un langage ?

Bien sûr et selon les époques, la longueur ou la coiffure prennent un sens différent. Prenons l’exemple des cheveux lâchés des femmes : en France jusqu’au XIXe siècle, une femme respectable ne sortait pas cheveux dénoués ; elle devait les attacher dès qu’elle quittait l’univers intime. De nos jours, ce cheveu libre ne fait plus l’objet d’un interdit social. Mais dans d’autres cultures, la chevelure n’est montrée qu’au mari tant sa portée érotique est grande.

On s’affirme avec ses cheveux ?

Ce sont des marqueurs de trangression et d’adhésion à un groupe. Prenez la coupe afro des années 1970 : elle exprime la révolte des Noirs américains, affirmant leurs cheveux crépus et leur négritude face à l’esthétique blanche, peau  claire et cheveux lisses.

Cheveux bouclés ou crâne rasé, tout est message ?

Le culte de la boucle remonte aux Grecs, à Apollon symbolisant le Dieu enfant. Les médailles d’Alexandre le Grand, avec sa crinière ondulée, ont véhiculé ce modèle dans toute la Méditerranée. Les longs cheveux bouclés sont symboles de puissance. Regardez la chevelure épaisse des Vikings, celle des rois francs, la mode des perruques lancée par Louis XIV à la cour. Le crâne rasé peut représenter le refus de l’ordre social comme dans le mouvement skinhead, ou le châtiment des femmes tondues en 1945. Il dit aussi le renoncement quand on entre dans les ordres ou la libération quand les femmes, après-guerre, adoptent des coupes garçonnes.

Leur couleur est aussi un symbole ?

Depuis Apollon, la blondeur c’est l’enfance, le soleil, l’or, le symbole de ce qui est précieux. Hollywood a joué sur ces archétypes en surexploitant la couleur jusqu’à la caricature, : les blondes sages comme Grace Kelly ou infantiles comme Marylin s’opposent à la brune Ava Gardner qui incarne l’intrépidité et une part virile. La sulfureuse chevelure rousse de Rita Hayworth fait d’elle un sex-symbol. Dans l’histoire, le roux, victime de sa rareté, signe le commerce avec le diable. Il symbolise le péché – Marie - Magdeleine est souvent représentée avec des cheveux roux – ou la sorcellerie au Moyen Âge.

Les cheveux expriment un lien avec l’âme…

Le cheveu pousse même après notre mort, il est imputrescible et nous relie à l’éternité. Son terreau c’est le crâne, le siège de la pensée, de l’âme pour les croyants. Notre chevelure est imprégnée des pouvoirs de cette intelligence humaine et divine. Une mèche de cheveux reste vivante, reliée à l’esprit du disparu. En témoignent la mode des cheveux en médaillon en Occident jusqu’au XIXe siècle ou les pectoraux amérindiens faits avec les cheveux des ennemis tués qui conservent leur pouvoir. Partout l’homme agit sur les cheveux pour participer au deuil, lier le vivant à l’au-delà et pour renaître.

Propos recueillis par Catherine Lalanne le 27 décembre 2012




lundi 25 février 2013

" Mes cheveux sont une part de moi-même "


Le témoignage de Valérie
" Mes cheveux sont une part de moi-même. Le matin, mon premier regard dans le miroir est pour eux.  Je ne peux pas me maquiller avant de les avoir lavés et peignés.  Quand je vais travailler, il faut qu’ils soient impeccables. Je suis huissière à l’Assemblée Nationale, j’harmonise ma coiffure avec l’uniforme que je porte. Dans l’hémicycle, pas  une mèche ne doit s’échapper de mon chignon strict, tiré bas sur la nuque. Le week-end, je me libère en les détachant. Quand mes cheveux respirent, je renoue avec ma féminité.. Ma couleur naturelle, c’est le blond mais après la naissance des enfants mes cheveux ont foncé. Depuis, je vais régulièrement les faire éclaircir chez le coiffeur pour retrouver ma chevelure insouciante d’avant.. Le blond c’est solaire, c’est synonyme de clarté, de vitalité, de jeunesse. Un jour, sur un coup de tête, pour changer de peau, je me suis faire teindre en brune : je me suis sentie pâle, maladive, en décalage total avec moi-même, dépourvue de charme. Les hommes ne me regardaient plus.
Toute ma vie, mes cheveux ont parlé pour moi.
Gamine, je les ai perdus quand j’ai appris brutalement le départ de mon père, infirmier militaire dans le Pacifique à Mururoa. C’était lui qui me démêlait les cheveux le soir avant d’aller me coucher. Il le faisait très doucement, mèche après mèche, pour ne pas me faire de mal. Je me souviens, je montais sur la table du salon pour me mettre à sa hauteur. Ce rituel de tendresse avant d’aller dormir était un talisman pour la nuit. La peur panique de ne jamais le revoir a été à l’origine de cette alopécie.
Sur ma photo de mariage, ma chevelure respire le bonheur, je me sens jolie, en harmonie avec leur coiffure très naturelle. Après la naissance de mes enfants, j’ai basculé dans la maternité, j’ai coupé mes cheveux, je n’avais plus le temps de m’occuper de moi, mes petits étaient ma priorité. Depuis mon divorce, je les laisse repousser. 
Pour qu’ils restent épais et brillants, je les entretiens en faisant des cures de levure de bière et de zinc. Je fabrique moi même des masques naturels à base d’huile d’olive et de citron. Ma mère et ma grand-mère avaient une vraie connaissance des plantes. On faisait beaucoup de choses par nous - même à la maison. La cuisine, les produits de beauté. Mes parents n’étaient pas riches, nous étions cinq enfants et pourtant ma mère allait chaque semaine se faire coiffer. Même malade ! Mon père l’accompagnait tous les vendredis chez le coiffeur, c’était son seul luxe. Elle ne s’achetait pas de robes chères, ne se maquillait pas, se parfumait très légèrement à l’eau de Cologne. Sa féminité discrète et naturelle, irradiait. Depuis qu’elle perd la mémoire, c’est moi qui la coiffe, je lui fais son brushing. Je vois à son sourire qu’elle est heureuse d’être bien coiffée.
La coupe énergétique au salon de coiffure d'Annie m’a libérée d’un chagrin que je n’avais pas pu exprimer. Je n’ai pas pleuré l'entrée de ma mère en maison de retraite médicalisée ni la mort de mon père. Ce chagrin d’adulte a réveillé celui de la petite fille qui apprenait le départ de son papa pour le Pacifique et craignait de ne plus jamais le revoir. La nuit qui a suivi la coupe, j’ai fait des cauchemars terribles et j’ai beaucoup pleuré les jours qui ont suivi l’expérience.
Le massage shiatsu du cuir chevelu, le travail sur les méridiens, la mémoire de mes cheveux, le dialogue avec la coiffeuse …tout m’a touchée, émue, libérée. Je me suis sentie écoutée, prise en compte. J’ai remis ma tête entre les mains d'Annie avec la même confiance que j’éprouvais enfant quand mon père démêlait mes cheveux longs. Quand on touche aux cheveux des personnes, on entre en lien intime avec elles et on prend le chemin de leur cœur "
Propos recueillis par Catherine Lalanne le 26 Décembre 2012


samedi 5 janvier 2013

L'origine de ce blog

C'est dans ton salon de coiffure Annie, où les femmes se racontent en te confiant leurs boucles, que m'est venue l'idée de créer ce blog où cheveux riment avec aveux.